La rédaction du CV est l'étape obligatoire - n'en déplaise à certain(e)s - qui matérialise votre entrée dans le monde des postulants et qui tétanise bon nombre d'entre vous. À tort car c'est la voie royale pour commencer à construire une carrière qui vous ressemble.
Si cette étape est si anxiogène, c'est pour deux raisons majeures. La première est qu'elle concrétise le changement tant attendu et que pour beaucoup, même s'il est souhaité, le changement est également perçu comme un risque. Ce risque est une chimère.
La seconde source d'anxiété, parfaitement compréhensible celle-ci, est que pour beaucoup, rédiger un CV revient à expliquer les dernières avancées en matière de physique quantique en mandarin. Non seulement on ne sait pas par quel bout le commencer, mais en plus, on ne sait pas comment le dire.
L'erreur majeure commise par beaucoup de candidats dont le parcours est beaucoup plus flatteur que le CV consiste à penser qu'un recruteur qu'ils n'ont jamais vu, à qui ils n'ont jamais parlé et qu'ils ne connaissent ni d'Eve ni d'Adam les connaît mieux que personne... Alors, à quoi bon s'embêter à être un tout petit peu précis, à détailler un minimum ce que l'on a fait et à expliciter ses résultats ? Pensez donc ! Alors quand ce maudit recruteur voit trois dates et deux expériences se battre en duel sur une demi-page et qu'il classe votre candidature sans suite, c'est bien entendu de sa faute !
Non seulement le recruteur ne vous connaît pas, mais il ne connait pas non plus toutes les entreprises de France et de Navarre et encore moins le pourtour et le contenu de votre poste dans ses moindres détails. Avez-vous déjà cherché un appartement ? Honnêtement, prendriez-vous la peine de répondre à une annonce rédigée de cette façon ?
"Appartement à vendre quelque part, une certaine surface, murs jaunes, sel et poivre rangés dans la cuisine, quelques pièces supplémentaires, un pull en soie et lavable en machine à 30°, prix le plus élevé possible.”
La réponse est bien entendue contenue dans la question. Alors, pourquoi rédiger son CV de cette façon ? Car c'est ce que la plupart d'entre vous font. L'immense majorité des curriculums vitae que nous recevons sont imprécis, se perdent en détails futiles et omettent au contraire les éléments les plus importants.
Pour que votre CV soit percutant, il doit correspondre à ce que recherche un recruteur ainsi qu'aux contraintes auxquelles il doit faire face.
Comment le recruteur sélectionne-t-il un CV au fait ?
Le recruteur est un professionnel comme vous et moi, et à l'instar de tout professionnel, il doit atteindre ses objectifs. Il doit aussi faire face à des contraintes ; le temps en est une.
Nous sommes conscients de faire tomber un mythe mais un recruteur, qu'il soit en entreprise ou en cabinet, ne consacre pas 15 minutes à la lecture de votre CV, même pas 5, ni une. En général, il y passe quelques secondes, entre 15 et 30 selon notre propre expérience et celles de nos consoeurs et confrères. "Mais comment ose t-il ce bougre ?!" Vous direz-vous peut-être à cet instant. Mais ce n'est pas pour rien que le recrutement est un métier.
Un responsable ou consultant en recrutement mène en général entre quinze et vingt missions en parallèle, doit qualifier un grand nombre de candidatures et ne sélectionner que les plus pertinentes.
Cela étant, même si le temps qu'il consacre à votre chef d'oeuvre est chronométré, il n'en reste pas moins efficace.
- Titre
- Dernières fonctions & entreprises
- Années d'expériences
- Durée moyenne en poste
- Formation
Voici dans l'ordre l'ensemble des critères qu'il passe en revue lorsqu'il reçoit votre CV. Si ceux-ci correspondent majoritairement au cahier des charges qui lui a été fixé par son client, interne ou externe, il affine par la suite la lecture avant de vous appeler et préparer ainsi mentalement les questions qu'il vous posera par téléphone.
Si aucun des critères ne correspond, la messe est dite. Mais si seulement certains de ces critères lui donnent satisfaction, vous entrez dans une zone grise dont il est difficile de sortir. Votre candidature devient alors celle qui correspond, mais pas tout à fait, et celle qui ne correspond pas, mais tout de même un peu... Suivez nos conseils, faites tout votre possible pour ne jamais entrer dans cet entre-deux.
La pile, quelle pile ?
Cette image est très populaire. On se figure que le recruteur est face à une pile de CVs qu'il classe méthodiquement et rigoureusement, égrenant patiemment celle-ci jusqu'à obtenir les cinq perles dont il a besoin.
Sur certains postes, en marketing ou en ressources humaines, cela peut être le cas, avouons-le, mais dans l'immense majorité des situations de recrutement, pas du tout. Le recruteur travaille le plus souvent au fil de l'eau et sa mission est alors ponctuée de petites piles d'un à dix CVs en fonction des moissons. S'il trouve un curriculum vitae intéressant, ou qui a le mérite de piquer sa curiosité, il décroche immédiatement son téléphone et vous appelle. Pour autant, recevoir un coup de fil ne signifie pas que vous avez marqué des points et que votre CV a fait impression. Parfois, le recruteur dispose de si peu de candidatures convaincantes qu'il vous appellera bien que votre profil ne corresponde que peu à sa recherche. Nous ne vous le cachons pas, vous partez alors de si loin qu'il sera très difficile d'inverser la tendance.
Ce constat est loin d'être reluisant mais ici encore ce n'est pas une fatalité. Considérez votre CV comme une plaquette de publicité (métaphoriquement bien sûr). Soyez trop succincts, et on ne saura pas vraiment de quoi vous parlez, dites-en trop et le message sera confus, brouillon.
Lorsque le recruteur vous appelle, cela ne signifie qu'une chose. Il a lu votre publicité. Est-il pour autant convaincu ? Non, il est au mieux intéressé, au pire désespéré et tente le tout pour le tout. Pour que l'argumentaire commercial fasse mouche lors de l'entretien, votre réclame doit être la plus éloquente possible. Si vous atteignez cet objectif, le déroulé même de l'entretien sera différent.
Si votre CV est peu détaillé, imprécis, sommaire ou au contraire brouillon, trop fourni et confus, le recruteur vous rencontrera peut-être faute de grive, mais l'entretien aura pour principal objectif d'apporter un minimum d'éclairage dans une caverne obscure. Le temps imparti n'y suffira pas. Quand bien même vous parvenez à expliquer clairement ce que vous faites et que votre interlocuteur dispose désormais d'une photographie précise vous concernant, vous serez passé à côté de l'essentiel : créer du lien et laisser une impression positive à votre interlocuteur.
Jeunes et naïfs consultants en recrutement que nous étions à nos débuts, nous envoyions tels quels à nos clients les CVs des candidats que nous rencontrions et qualifions en entretiens... Ma quelle belle erreur ! Beaucoup de très bonnes candidatures, beaucoup de bons candidats étaient rejetés malgré nos recommandations favorables. Pourquoi ? La faute à des CVs mal rédigés, peu clairs... En trois mots, de mauvais curriculums. Et pourtant, il ne suffit que de quelques retouches cosmétiques et d'une bonne dose de bon sens pour que citrouille devienne carrosse.
Alors, pourquoi ne pas essayer autre chose ? L'unique objectif de l'entretien est finalement de savoir qui vous êtes. Et vous êtes bien plus qu'une simple profession, qu'un parcours ou qu'une situation. Un CV, même excellent, ne permettra jamais de synthétiser qui vous êtes, un millier de pages n'y suffiraient pas plus. Pour autant, un CV très clair, bien construit, qui explicite magnifiquement ce que vous avez fait et quels ont été vos résultats, confortera le recruteur dans le fait qu'il doive vous appeler. En descendant l'escalier qui le mène à la salle d'attente, il doit se dire : "Je tiens à coup sûr le bon profil, je n'ai plus qu'à m'assurer qu'il soit le bon candidat". L'entretien sera tout différent, vous pouvez nous croire sur parole.
Comments